Poly Rythmo : le tout puissant orchestre

Croquis Julie Savoye L'Escamoteur Poly-Rythmo Cotonou

Vous prenez un bus compliqué qui vous mène à une église. De cette église vous traversez une bonne partie de l’huppé Neuilly. Les voitures continuent de vous doubler mais les immeubles sont remplacés par des arbres. L’heure est trop peu avancée pour assister aux mythes du lieu. Vous continuez de fendre la forêt pour finalement pénétrer une ample clairière. De cette dernière surgit un oiseau de verre, de métal et de bois. Loin de seulement chanter et voler il propose une exposition intitulée Art/Afrique, Le nouvel atelier. Vous êtes à la Fondation Louis Vuitton où se produit ce soir l’orchestre Poly-Rythmo du Cotonou. Le chemin pour parvenir au concert fut long : photographies de soirées funk dans le Bamako des années 60 par Malick Sidibé, coucher de soleil sur le toit de la Fondation, pluie sur les parois de verre… Vous l’aurez compris, long mais parfait.

 

Les influences du Poly-Rythmo

Le Poly-Rythmo est né en 1966 à Cotonou, ville du Bénin. On a tendance à réduire la musique africaine à l’afrobeat mais elle n’en demeure qu’un courant. On vous fait un petit dessin des origines culturelles de la musique proposée par l’orchestre :

carte highlife afrobeat rumba poly-rythmo

Le highlife date du début du siècle dernier, né à Accra en Côte-de-l’Or (l’actuel Ghana), il mêle musiques d’église et fanfares militaires.

La rumba congolaise est elle-même originaire des années 1930 grâce aux marins qui travaillaient sur les transatlantiques voguant notamment dans le Golfe de Guinée. Nécessitant beaucoup de main d’oeuvre, ces bateaux recouraient à une main d’oeuvre tant aux Caribéens qu’aux Africains. Ces derniers s’échangeaient des disques et c’est ainsi que la rumba cubaine est arrivée au Congo.

L’afrobeat est né dans les années 1960 avec la figure de Fela Kuti, on vous en parle ici.

Il y avait aussi le funk de James Brown, mais ça vous connaissez.

 

Poly-Rythmo s’exporte

Tel un volcan, Poly-Rythmo est le plus ancien orchestre africain encore en activité. Comment expliquer son peu de renommée comparé à un Fela Kuti ou un Manu Dibango, artistes avec qui ils ont d’ailleurs joué ? De sa naissance en 1968 jusqu’au début des années 1990, l’orchestre béninois ne se produisait en effet qu’en Afrique. Voyons plutôt trois étapes clés qui ont permis à l’orchestre de traverser les Océans pour parvenir à nos oreilles.

1. Les rééditions

2004 : Luaka Bop, label tenu par le David Byrne de Talking Heads, sort une compilation de Funky Fuzzy Sounds of West Africa où figure un morceau du groupe. Il en va de même pour Soundway Records la même année, qui sort cette fois-ci une compilation exclusivement dédiée au groupe. 2009, le label allemand Analog Africa réédite un de leurs albums intitulé Echos Hypnotiques.

2. Le live

Début des années 1990 : La « défricheuse sonore » Elodie Maillot se rend au Bénin et découvre l’orchestre. Elle sort une émission chez France Culture et quelques temps plus tard, interviewant Franz Ferdinand, ces derniers la supplient de faire venir le groupe en Europe. Elle retourne sur les terres béninoises, il se passe ce qu’il s’y passe et revenant avec elle ils font leur première tournée hors Afrique.

3. La mixtape

João Branco Kyron a entendu l’orchestre pour la première fois en écoutant justement la compilation de Luaka Bop. Ca lui a plu tout comme ça nous a plu mais dans une autre mesure : il s’est mis à acheter tous les vinyles qu’il pouvait afin de toujours mieux connaître ce prolifique orchestre (246 sorties au compteur de Discogs).

 

Poly-Rythmo est parti, Poly-Rythmo revient

Ils sont allés enregistrer à la Société africaine des techniques électroniques alias SATEL au Lagos, un des seuls studios analogiques d’Afrique à l’époque. On compte notamment Salif Keita parmi ceux qui y ont enregistré. C’est là qu’ils ont signé leur album Madjafalao qui signifie « prend garde ». On vous invite à voir ce qu’ils donnent en live, et si vous préférez écouter ça chez vous vous pouvez toujours vous le procurer dans tout bon disquaire ou l’écouter sur la plateforme de votre choix. Puis pour approfondir un peu vous pouvez toujours jeter un œil à leur site : http://www.poly-rythmo.com/

dates 2017 tournée polyrythmo

 

Un croquis de Julie Savoye

Une mixtape de João Branco Kyron

Un texte de Nils Savoye

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