1996. Un peu plus tôt dans la décennie, Laurent Garnier en a marre qu’on assimile musique électronique et ecstasy. Pour contrecarrer ces préjugés bien ancrés, il reprend la Fnac Music Dance Division et l’appelle sobrement F Communications avec ce slogan : « After E comes F ». L’ecstasy, c’est fini, on est dans le futur. Les sorties fusent, on édite Mr Oizo, Laurent Garnier himself, Saint-Germain, Manu Le Malin… Des titres devenus classiques, tout comme le 12 » de Norma Jean Bell datant de 1996 : I’m The Baddest Bitch. Elle chante, joue, arrange et écrit le tout tandis que Kenny Dixon Jr. alias Moodymann gère la production. Mais si je ne me trompe pas, Norma Jean Bell a déjà une bonne trentaine d’années au milieu des années 90. Quel parcours l’a menée à la house ? C’est ce qu’on vous raconte aujourd’hui.
Norma et la fusion des seventies
Citons trois groupes dans lesquels Norma Jean Bell a évolué. D’abord, le Mahavishnu Orchestra. Un orchestre de jazz rock fusion qui a accueilli entre autres le violoniste Jean-Luc Ponty, le batteur Bill Cobham et le sax Bill Evans. Ensuite, le grand Frank Zappa qu’elle a suivi sur une tournée en 1975 et dont on conserve un enregistrement : Joe’s Menage, album édité en 2008. Elle s’illustre particulièrement sur le Chunga’s Revenge de 14 minutes (pas de panique, il ouvre la playlist). Mais, elle se serait apparemment faite virer à cause d’une consommation outrancière de drogue… Six mois plus tard, Tommy Bolin (ex-guitariste de Deep Purple sur l’album Come Taste The Band) l’engage dans son groupe. Il meurt d’une overdose l’année suivante. Ah oui, last but not least, madame a joué avec le génial et tout aussi expérimental Parliament Funkadelic. On est donc en droit de le dire : elle a artistiquement existé avant de se mettre à la house.
1996 : Pandamonium
On a trace dans les années 1980 que « Norma Jean Bell & the All-Stars » se produisait dans un club de Detroit nommé « Axel » et où elle faisait essentiellement des reprises. Sinon, c’est un trou de 20 ans qui s’offre à nous entre son travail avec Tommy Bolin et la fondation de son label Pandamonium en 1996. Indépendante, sa première sortie est le magnifique I’m The Baddest Bitch. Sur 24 sorties étalées entre 1996 et 2003, 18 sont d’elles. On joue sur une deep house très fine avec le travail de Kenny dixon Jr. alias Moodymann en backup. Chaque 12 » sort avec une version de Moodymann un peu plus propice aux clubs. Irrémédiablement, son sax entêtant nous captive. C’est presque une flûte arabesque, en témoigne le One Of Those Nights (Late Night Mix) qu’on vous a mis dans la playlist, avec sa voix bien langoureuse.
Puisqu’un label c’est aussi du partage, parmi les auteurs qu’elle a mis en avant, on compte deux 12 » de Dewayne Davis qui honnêtement ne valent pas le coup. La deuxième sortie sample d’ailleurs bizarrement Papa Was A Rolling Stone, ça a un peu vieilli… Le plus surprenant reste sans doute le 12 » I’m Gonna Get Ya! de Sharon Jones. On vous parlait d’elle il y a à peine un mois. Fondatrice des Dap Kings, elle a fait beaucoup de bien à une certaine renaissance de la soul. Un parcours intéressant qui est finalement à l’inverse de Norma Jean Bell : partie de la house pour aller à la soul. Surtout, notons sur l’edit de Moodymann que nous vous mettons dans la playlist, le petit sample du We Almost Lost Detroit de Gil Scott Heron (dont on vous parlait aussi il y a peu…). Enfin, un petit edit de Don’t You Want My Love. Là, vous devriez être rhabillés pour l’hiver.
Signature et crédits :
Le son : Sélection de Nils Savoye.
Le texte : Nils Savoye
Le visuel : Tout grand merci à Marie Casaÿs qui s’est ici inspirée d’une photo trouvée sur les internets.